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    Plongée initiatique dans la « Nuit » au Jardin des Plantes à Paris

    Plongée initiatique dans la Nuit au jardin des Plantes à ParisPour les être diurnes que nous sommes, la profondeur et l’obscurité de la nuit nous apparaissent à la fois autres, déroutantes et inquiétantes. Plongés dans son opacité, nous nous sentons démunis et en danger car nous perdons nos repères. Depuis la nuit des temps, l’homme cherche à combattre les ténèbres nocturnes qui, en nous enveloppant, semblent n’avoir d’autre raison d’être que de nous menacer et nous réduire à l’impuissance en nous privant de la lumière dont nous avons tant besoin. L’exposition « Nuit » au Muséum d’Histoire Naturelle du Jardin des Plantes à Paris nous offre la magistrale opportunité de saisir à bras-le-corps cet élément qui n’est pas le nôtre, en pénétrant dans son temple  et en contemplant son mystère.

    L’homme a longtemps craint la nuit, parce qu’il la rendait responsable de la disparition du jour et qu’il croyait que la restitution de celui-ci dépendait du bon vouloir de la divinité en noir. Les Egyptiens croyaient ainsi que Nout la déesse de la nuit avalait le jour chaque soir pour lui donner à nouveau naissance au matin, tandis que les Incas étaient convaincus que le soleil plongeait chaque soir dans l’océan à l’Ouest et nageait toute la nuit sous la terre avant de réapparaître à l’Est le matin.

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    Mais la nuit n’est pas un « trou noir » qui se nourrirait de la lumière du jour en l’aspirant et en l’engloutissant goulûment. L’exposition met les choses au clair dès que nous y pénétrons. La plongée subite dans le monde scintillant de la nuit étoilée s’accompagne d’une sensation immédiate de bien-être et d’émerveillement. Telle l’immersion dans une chambre noire, celle dans l’obscurité de la nuit est le passage obligé pour mettre en lumière et révéler l’éclat des milliers d’étoiles qui peuplent la voûte céleste dont la présence demeure invisible et cachée sous le faisceau trop intense de la lumière diurne.

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     La seconde épreuve qui nous attend est l’immersion en forêt de nuit. L’obscurité totale qui y règne nous impose une perception inédite et inversée, telle un négatif, de ce que nous pouvons sentir et connaître en journée. En période diurne, notre vue est le sens qui est le plus sollicité. Face à cette prépondérance, les autres sens s’assoupissent. En période nocturne, en revanche, notre vision devient confuse sinon nulle et nous laisse désorientés. C’est à ce moment-là que notre ouïe prend le relais en s’intensifiant, pour compenser la déficience visuelle.

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    Les silhouettes fantomatiques des grands arbres stylisés accompagnés des quelques deux cent cinquante animaux naturalisés qui se distinguent à peine sous un éclairage quasi lunaire composent une forêt poétique qui s’emplit alors toute entière de stridulations d’insectes, de bruissements, grognements, chuintements, hululements, coassements, froissements et autres frôlements. Dans le creuset de la chambre nocturne, la forêt surgit comme une immense rumeur symphonique qui nous révèle l’intense activité animale qui y règne. Présents mais tapis invisibles dans le monde diurne en raison même parfois de la lumière trop vive, les rampants, volants, grimpants,marchants et nageants nocturnes attendent leur heure pour se dévoiler en allant se nourrir, chercher un partenaire ou élever leur progéniture.

    Plongée initiatique dans la Nuit au jardin des Plantes à ParisPlongée initiatique dans la Nuit au jardin des Plantes à Paris

    Plongée initiatique dans la Nuit au jardin des Plantes à ParisPendant que les uns s’éveillent, les autres dorment. Bercés par le flux et le reflux des respirations sonores, nous pénétrons dans le royaume des animaux endormis, dont les spécimens présentés ont été naturalisés pour les besoins de l’exposition. Au travers du prisme de la nuit, nous découvrons que le sommeil n’est pas un temps mort caractérisé seulement par l’absence de conscience et de mouvement, mais une période de régénérescence primordiale pour l’organisme. La nuit, la respiration se fait plus profonde et témoignent de l’élan vital qui nous anime. Telle une chambre noire, l’obscurité de la nuit révèle la dormance réparatrice de la vie diurne en nous permettant « d’imprimer » le jour et en déclenchant la production (inhibée par la présence de lumière) de la précieuse mélatonine, régulatrice d’hormones, antioxydante et protectrice du système immunitaire.

    Plongée initiatique dans la Nuit au jardin des Plantes à ParisPlongée initiatique dans la Nuit au jardin des Plantes à Paris

    Plongée initiatique dans la Nuit au jardin des Plantes à Paris

    Nous ressortons de cette immersion initiatique totalement au diapason avec les mystères de la nuit. Désormais convaincus de son caractère nécessaire, nous prenons dans le même temps conscience de sa vulnérabilité face à l’esprit de conquête de l’homme qui ne cesse de rétrécir son espace vital telle une peau de chagrin. Il semble en effet que l’expansion des éclairages artificiels et intrusifs « pollue » l’alternance jour-nuit et perturbe l’horloge biologique et les cycles de vie des animaux aussi bien nocturnes que diurnes. Concurrencée par la pollution lumineuse, la petite lumière émise par la luciole pour attirer son partenaire sexuel n’arrive plus à porter aussi loin qu’avant, et se mue en un signal d’alerte emblématique. En passant du statut d’opprimante à opprimée, la nuit devient dès lors un sanctuaire à préserver.

    Plongée initiatique dans la Nuit au jardin des Plantes à Paris

    Source : Christine

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